Le rire sans racine,
masque lâenfant qui refuse â
la forĂȘt lâattend.
La mise en scĂšne du refus de grandir
Il existe aujourdâhui, en France, une forme de rĂ©bellion qui nâen est plus une.
Un théùtre du âje mâen fousâ permanent, oĂč le grotesque devient marque de fabrique et oĂč la paresse se fait passer pour libertĂ©.
Câest le rĂšgne du sale gosse professionnel, celui qui confond authenticitĂ© et absence de profondeur.
ZawaProd en est le symptÎme le plus pur : la provocation sans pensée, le rire sans racine.
On y cĂ©lĂšbre la vulgaritĂ© comme une victoire culturelle, on sâamuse dâĂȘtre bĂȘte comme si câĂ©tait un acte de courage.
Mais cette rébellion-là ne renverse plus rien : elle conserve.
Elle conserve lâimmaturitĂ© comme modĂšle de vie.
Le conservatisme du rire creux
Sous le vernis du âje dis tout haut ce que les autres pensent tout basâ, il y a un refus plus grave : celui dâĂ©voluer.
Rire de tout devient un moyen de ne rien affronter.
On joue au provocateur comme lâenfant joue avec ses excrĂ©ments : non pour comprendre le monde, mais pour attirer le regard.
âRester dans lâesthĂ©tanerie â vivre de la pose, de lâattitude sans contenu â devient une stratĂ©gie de survie.â
Ce nâest pas de la libertĂ© : câest une peur.
Peur de grandir, peur dâapprofondir, peur de devenir.
Ce nâest plus lâhumour du sage, mais celui du fuyard.
Les maĂźtres trahis
Kant appelait à sortir de la minorité.
Nietzsche voyait dans lâenfant lâesprit libre â non pas lâinfantile, mais le crĂ©ateur.
Arendt avertissait : quand le divertissement devient norme, il asphyxie la pensée.
Et Debord, bien avant les plateformes, avait vu que la rĂ©volte sans fond nâest quâun produit de plus dans le spectacle.
Ceux qui revendiquent aujourdâhui la bĂȘtise comme esthĂ©tique se croient libres, mais ils ne font que reproduire la forme la plus douce de la soumission : celle qui sâignore.
Ceux qui savaient rire pour grandir
Rabelais riait gras, mais pensait haut.
Breton et DalĂ dĂ©liraient, mais pour libĂ©rer lâinconscient.
Camus aurait pu sâenliser dans lâabsurde, il en a fait une Ă©thique.
IAM ou Oxmo Puccino ont gardĂ© la gouaille du gamin, mais lâont Ă©levĂ©e au rang de sagesse.
Le problĂšme nâest pas de rire â câest de ne plus savoir pourquoi.
Choisir lâĂ©volution
Il y a dans le mot âgrandirâ quelque chose dâimpopulaire.
Parce quâil suppose de renoncer Ă la posture. De transpirer, de douter, de se taire parfois.
Mais grandir, câest aussi crĂ©er.
Câest transformer le jeu en art, le cri en parole, la provocation en sens.
âLe vrai rebelle nâest pas celui qui reste enfant pour toujours,
mais celui qui ose devenir adulte sans cesser de crĂ©er.â
La forĂȘt attend.
Et ceux qui y entreront, sans masque ni micro, trouveront peut-ĂȘtre la seule chose que le rire ne donne jamais : la profondeur.
Jouer Ă choquer,
ou grandir dans la lumiĂšre â
choix dâun vrai rebelle.