Cher ami,
Je t’écris sans colère, et sans volonté de te ridiculiser. Je t’écris parce que je crois que derrière ton masque de lutte, il y a un cœur qui veut le bien, qui veut la justice, qui veut protéger. Et ça, je le respecte.
Mais regarde où tes pas t’ont mené : toi qui disais vouloir combattre le fascisme, tu as adopté ses méthodes. Toi qui rejetais l’intolérance, tu refuses désormais d’écouter. Toi qui voulais protéger les faibles, tu es devenu une milice qui frappe avant de comprendre.
Je ne doute pas de ta sincérité initiale. Peut-être que tu as souffert, ou vu des injustices qui t’ont révolté. Mais l’énergie qui pouvait te donner force et courage, tu la retournes maintenant contre tes semblables. Et ça ne fait pas avancer la cause, ça détruit.
Ce que tu appelles “lutte” devient une prison : tu ne parles plus, tu hurles ; tu n’argumentes plus, tu condamnes ; tu ne construis plus, tu annules. Or, une société ne se change pas par la haine des autres, mais par la découverte de soi, par l’attention, par la patience de convaincre.
Je ne t’écris pas pour te convertir, ni pour que tu penses comme moi. Je t’écris parce que je crois que ta colère est noble à l’origine, mais qu’elle a été trahie par la forme que tu lui as donnée.
Un antifasciste qui agit comme un fasciste n’a pas vaincu son ennemi : il l’a intériorisé.
Je rêve d’un combat plus vrai, plus digne : celui où l’on devient meilleur, pas où l’on écrase. Si un jour tu veux en reparler, je suis là. Non pas comme un adversaire, mais comme un frère qui refuse que nos différences soient des murs.
Avec respect,
Un homme qui croit encore à la liberté.